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La Rencontre pour la paix et les Droits de l'Homme (RPDH) de Christian Mounzéo appelle dans une déclaration publiée ce 15 septembre à l'occasion de la journée internationale de la démocratie célébrée le 11 septembre dernier, le gouvernement à garantir l'intégrité physique des journalistes dans l'exercice permanent de leur fonction. La RPDH a mis en exergue la récente agression du journaliste Eli Smith, directeur général de la télévision MNTV. Pour le secrétaire général de la RPDH, Franck Loufoua Bessi, il s'agit là "des faits qui ne peuvent garantir l'Etat de droit au Congo". Par ailleurs, l'organisation des droits de l'Homme basée à Pointe-Noire, doute toujours de l'équité et de la légitimité des compétition électorales organisées dans le pays. Voici en intégralité la déclaration publiée ce matin par la RPDH :

Brazzaville - Pointe Noire, le 15 septembre 2014. Après une longue période de gestion monopartite du pouvoir, le Congo s’est engagé sur le chemin de la démocratie pluraliste à partir de 1990. Plus de vingt ans plus tard, il est indéniable que la démocratie peine à s’enraciner durablement. La Rencontre pour la Paix et les Droits de l’homme (RPDH) constate avec regret que le pays reste marqué non seulement par des périodes récurrentes d’atteintes aux droits et libertés fondamentaux, mais aussi par, l’absence de dialogue véritable entre les différents acteurs du jeu politique, la confiscation des médias par les décideurs publics, la pérennisation de la corruption et de l’impunité, Ce cycle rendant incertain l’organisation consensuelle libre et légitime des compétitions électorales.

La Conférence nationale souveraine de 1991 avait pourtant été un moment d’espoir pour le peuple congolais. Elle avait jeté les bases d’une démocratie effective. Malheureusement, les crises politiques et conflits armés de la décennie 90 ont remis en cause bien de ses acquis.

S’il est constant que la compétition électorale est une réalité depuis la relance du processus démocratique en 2002, il n’en demeure pas moins vrai que les consultations électorales organisées depuis lors n’ont guère été exemptes de contestations et ont manqué de crédibilité, voire de légitimité ; nonobstant le fait que les différents scrutins ont été encadrés par un dispositif normatif important. L’expérience des élections législatives de 2007, de l’avis de bien d’observateurs tant nationaux qu’internationaux, a montré des insuffisances et des irrégularités criardes. Les élections de 2009 et de 2012 ont mis à jour des faiblesses du système électoral et des dysfonctionnements administratifs importants. Depuis, le doute s’installe dès la tenue des actes préparatoires, par la composition de l’organe chargé d’organiser le scrutin, la CONEL, qui comporte peu de garanties d’indépendance, et la conception du fichier électoral, dont la fiabilité demeure problématique, ses résultats n’ayant jamais obtenu à ce jour la caution populaire.

Les concertations tenues à Ewo et à Dolisie à l’initiative du Gouvernement, qui devaient être des cadres de lancement d’un dialogue véritable en vue d‘une organisation consensuelle des élections, ont été des rendez-vous manqués en ce sens qu’elles n’ont guère vidé le contentieux électoral ni comblé les attentes de l’opposition et des citoyens. Pour preuve, les résolutions les plus élémentaires issues de ces assises, devant notamment décharger l’Exécutif d’un certain nombre de responsabilités dans le cadre électoral, n’ont pas connu un début d’exécution à ce jour. Cet état de fait justifie à suffisance la méfiance de l’opposition et des populations face au processus électoral lancé avec le recensement administratif spécial de 2013. En témoigne, la déclaration du collectif des partis de l’opposition rendue publique le 23 mars 2014 à Brazzaville, demandant au Président de la République d’invalider les résultats dudit recensement administratif spécial. La convocation récente du corps électoral par le Chef de l’Etat pour participer aux élections locales du 28 septembre 2014, après qu’elles aient fait l’objet de deux reports, épouse la logique unilatéraliste et du fait accompli propre au Gouvernement congolais, toujours enclin à rejeter les aspirations citoyennes contraires à ses objectifs. L’organisation d’élections fiables constitue pourtant une exigence de la démocratie. Car il ne peut y avoir de démocratie sans un processus électoral libre, transparent et légitime.

La Constitution du 20 janvier 2002 a renforcé l’armature juridique des droits et libertés. Ce qui constitue une avancée considérable, car le Congo est l’un des premiers pays d’Afrique à avoir repris les dispositions de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et des autres instruments pertinents en la matière dans le préambule de sa constitution. Le respect des droits fondamentaux humains peut être perçu à ce titre comme étant une exigence constitutionnelle.

Toute fois, le respect et la mise en œuvre desdits droits reste une gageure dans le pays au regard des exactions. On note entre autres sur le territoire des violations des droits de l’homme, dont essentiellement : La pratique systématique de la torture par les forces de l’ordre pour extorquer des aveux ou punir des individus ; des arrestations arbitraires et détentions prolongées en dehors des délais légaux ; une mauvaise redistribution des richesses nationales avec pour conséquence un accès limité de la majorité des citoyens aux droits économiques et sociaux ; une pauvreté devenue chronique ; l’assignation à résidence des leaders politiques ; le harcèlement continu des citoyens indépendants ; la tenue de parodies de procès visant à disqualifier certains acteurs de la scène nationale ; des atteintes régulières à la liberté de réunion et de manifestation à l’encontre de l’opposition notamment mais aussi à la liberté de la presse caractérisées essentiellement par la censure dans les médias et la violence de plus en plus accrue à l’égard des journalistes, cas d’Elie SMITH, journaliste à MNTV victime d’agression et du viol de sa sœur par des hommes armés dans la nuit du 9 au 10 septembre 2014 à son domicile de Brazzaville, reproché d’avoir diffusé sur les réseaux sociaux des photos des militants de l’opposition copieusement molestés au sortir d’un meeting organisé le dimanche 7 septembre 2014 au Palais de Congrès de Brazzaville… Tant de faits qui ne peuvent garantir l’Etat de droit, en l’absence d’une réelle volonté des décideurs.

Malgré la stabilité politique et économique impulsée par la constitution du 20 janvier 2002, des débats ont actuellement cours sur le changement ou la modification de cette constitution.

La République du Congo a connu plusieurs révisions et changements de constitution. En cinquante quatre ans d’indépendance, le Congo a réalisé un record constitutionnel avec à son actif pas moins de sept Constitutions et Actes fondamentaux. Ces changements ne peuvent favoriser la stabilité des institutions. Si, depuis le 4 octobre 1958, date de la proclamation de la cinquième République, la France n’a connu qu’une Constitution (incluant 24 réformes intervenues entre 1962 et 2008) avec un régime stable propice à l’alternance de sept (7) Présidents de la République, le Congo quant à lui connaît une instabilité institutionnelle, une rare alternance démocratique avec un passage de cinq (5) citoyens à la Présidence de la République. Pour les Etats Unis, avec une Constitution vieille de 200 ans, le pays connaît une stabilité des institutions, une coutume constitutionnelle et un passage de quarante quatre citoyens à la présidence de la République.

La longévité moyenne des constitutions au Congo est faible. Elle ne peut ainsi contribuer efficacement à une stabilité des institutions, une alternance démocratique et l’émergence d’une pratique constitutionnelle. L’on pourrait même affirmer que chaque régime arrive au pouvoir avec «sa Constitution». De plus, il y a lieu de rappeler que les révisions ou les changements de constitutions au Congo ont toujours été la conséquence des crises politiques graves. Aujourd’hui, aucune crise politique majeure ne peut motiver une révision ou un changement de la Constitution.

La Constitution du 20 janvier 2002 peut certes être modifiée ou changée pour des motifs légitimes et opportuns. Quoique, aucune initiative de révision ne peut être engagée envers certaines dispositions intangibles du document fondamental. Réviser ces dispositions serait de nature à compromettre la cohésion nationale, la démocratie et l’alternance. Au nombre de ces dispositions, l’on peut citer : L’article 185 en ses alinéas 2 et 3 qui stipulent respectivement : « Aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire » ; « La forme républicaine, le caractère laïc de l’Etat, le nombre de mandats du Président de la République ainsi que les droits énoncés aux titres I et II ne peuvent faire l’objet de révision ». Les initiateurs du débat suscité devraient garder à l’esprit la nécessaire stabilité des institutions, comme gage de paix et d’émergence. Il est clair, somme toute, qu’aucune révision ou changement ne devra faire l’impasse sur les notions d’alternance, de responsabilité, de transparence, de reddition des comptes, de renforcement des droits et des libertés.

Par ailleurs, ni la création d’un Ministère de la Justice et des Droits Humains, ni la création d’une Commission Nationale des Droits de l’Homme au sein du paysage institutionnel n’ont suffi à inscrire dans les réalités sociales les engagements du Gouvernement en matière de droits de l’homme. La RPDH estime que les nombreuses violations des droits humains recensées, résultent non seulement du manque de formation des agents chargés de rendre effectif lesdits droits, mais aussi de l’impunité et de la corruption qui gangrènent de manière générale tous les secteurs d’activité du pays.

La RPDH rappelle que les droits et libertés, tels que prévus dans l’ordonnancement juridique interne du Congo et à travers les instruments du droit international auxquels le pays est partie, constituent des piliers essentiels de l’Etat de droit et que par conséquent, aucune démocratie ne peut se construire durablement sans tenir compte des engagements pris en matière de gouvernance, de transparence et de respect des droits de l’homme.

Face à ce qui précède, la RPDH recommande au Gouvernement de la République de :

  • Respecter et se conformer aux dispositions de la Constitution du 20 janvier 2002 qui consacrent les droits et libertés des citoyens congolais ;
  • Promouvoir un dialogue franc et direct entre les différentes forces vives du pays en vue de parvenir à un processus consensuel d’organisation des élections ;
  • Promouvoir la formation des agents du secteur public, en particulier des forces de l’ordre aux questions des droits de l’homme ;
  • Doter les institutions publiques de réels pouvoirs et d’indépendance, notamment celles en charge de réguler les élections et l’activité des médias au Congo ;
  • Mettre un terme à la corruption et à l’impunité, en mettant à la disposition de la justice tous les auteurs d’actes répréhensibles ;
  • Mettre un terme à la pratique de la censure dans les médias ;
  • Garantir l’intégrité physique et psychologique des membres de l’opposition, des journalistes, des syndicalistes et des militants de la société civile ;
  • Promouvoir un système judiciaire accessible aux citoyens, indépendant et impartial ;
  • Garantir les droits et libertés, en se conformant aux dispositions de la DUDH ainsi que de tous les instruments pertinents y relatifs dûment ratifiés par le Congo ;
  • Garantir la stabilité institutionnelle comme gage de paix et de cohésion sociale en République du Congo. Le Bureau Exécutif
Tag(s) : #Droits Humains
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