Chaque candidat mouille le maillot pour le 20 mars
Les neuf candidats à la présidentielle du 20 mars n’ont plus que 4 jours pour mouiller le maillot. La lutte est rude, il ne faut pas se leurrer, les journalistes indépendants ont eu de quoi se mettre sous la dent, contrairement aux élections des années 2002 et 2009, boycottées par l’opposition. Bien que le candidat Denis Sassou N’Guesso, parti favori dès l’entame de la compétition, les résultats des urnes resteront à jamais la vraie inconnue de ce scrutin.
Avant on misait sur le taux de participation aux scrutins. Aujourd’hui, on sait qu’il va quasiment tripler voire plus. Les leaders de l’opposition ayant appelé leurs partisans à se faire enrôler massivement sur les listes électorales, on notera plus d’engouement le jour de vote.
Les candidats ne sont pas dupes. A armes inégales parfois, ils se battent fortement à se tailler une place de choix au soleil. Alors que le président sortant Denis Sassou N’Guesso était le seul à affirmer qu’ils battraient les autres dès le premier tour, Jean Marie Michel Mokoko s’est dit lui aussi capable de passer dès le premier tour, surpris par la marée humaine qui l’a accueilli à Pointe-Noire.
Sassou N’Guesso mouille bien son maillot
Depuis le début de la campagne, le candidat Denis Sassou N’Guesso n’a de répit. Il fait chanter « Sassou président » à Pointe-Noire, il tire au penalty à Lékana, il danse à Gamboma…De toute façon, triompher sans peine n’a pas de gloire. De Pointe-Noire où il a lancé sa campagne le 5 mars, il a filé à Ewo dans la Cuvette Ouest. C’est de là qu’il descend lentement jusqu’à Brazzaville. D’après les images fournies par ses partisans (la direction de campagne n’ayant pas fait mieux), on constate de grandes foules à Impfondo dans la Likouala, à Ouesso dans la Sangha, à Mossaka et surtout à Makoua dans la Cuvette, Owando et Oyo ayant été conquis. A Lékana et à Gamboma, Sassou N’Guesso y est presque allé en terrain conquis.
La dernière ligne droite qui court jusqu’à vendredi nuit, le président sortant a encore devant lui les villes de Kinkala, Mindouli, Madingou, Nkayi et Dolisie. Sibiti et Mossendjo pourront le voir aussi s’il n’est pas trop tard, car il y a l’étape finale de Brazzaville. Bien que sa position du chef de l’Etat lui accorde certaines facilités tel que l’accès à différents endroits, le transport et l’aide des agents de l’Etat, le chef de l’Etat congolais n’a pas oublié les enjeux en face de lui. Tous les jours, il communique lui-même à ses électeurs, les persuadant à le voter dès le premier tour. A bord d’avion, de voiture, Sassou N’Guesso ne manque pas une occasion de rencontrer le peuple profond. Une forte mobilisation, motivée par l’argent et les gadgets de campagne donne un succès à ses meetings. Ce qui n’est pas forcement l’expression finale du peuple.
Le général Mokoko croit
Le général Jean Marie Michel Mokoko a presque eu des soubresauts et des sursauts lorsqu’il a été débarqué du véhicule par des jeunes à Mengo à l’entrée de Pointe-Noire pour arriver à Lumumba, au cœur de la ville océane, à pied. C’est là qu’il a reçu son bâton de Moise et son quatrième M, devenant donc Jean Marie Michel Moise Mokoko, J4M. Face à la marée humaine qui l’a accueilli le 12 mars, il a cru, lui aussi, passer dès le premier tour. Mais bien entendu, c’est un peu partout que des foules sortent le voir. Après Kinkala, Mindouli, Madingou, Nkayi, Dolisie, Pointe-Noire, Sibiti, le général Mokoko a entamé une tournée au nord du pays. Son équipe de campagne déplore l’absence des moyens de transport mis en jeu pour aborder cette campagne électorale à l’américaine. Aucune autorisation ne leur serait accordée pour décoller à bord de leurs avions et hélicoptères…
Son entrée à Owando le 14 mars a mis la ville en ébullition. Les femmes de la ville, au lieu de venir prendre les pagnes de campagne, c’est elles, au contraire, qui étalent les leurs afin de permettre à leur « Moïse » de marcher dessus. L’interpellé quotidien de la DGST soulève les foules. Sa marche vers Makoua et Mossaka, les deux villes dont il est très attaché par les liens familiaux devrait consacrer son optimisme de sortir vainqueur dès le soir du 20 mars.
Parfait Kolelas serre les vieux
Privé par son petit frère Landry et la justice de la formation politique créée par son père, le MCDDI, Guy Brice Parfait Kolelas est plutôt bien parti. Sa jeunesse et sa virginité en politique n’ont finalement pas été un obstacle, il a bien été le fils de son père, consacré par Bernard Albert Bakana Kolelas. Sa tournée dans les quartiers de Brazzaville a laissé une image impressionnante, celle de ce jeune homme assis sous une pluie battante attendant le meeting du samedi 5 mars. Parfait lui-même a fini par lui répondre sous la pluie, annonçant que l’heure de prendre le pouvoir est arrivée.
Deux meetings à Pointe-Noire, un à Dolisie, un autre à Nkayi où il a cédé son installation à J4M, Guy Brice Parfait Kolelas n’a pas été solitaire à Mouyondzi ni à Sibiti. Les militants sont venus l’applaudir. La dernière ligne droite devrait le projeter vers le nord du pays où les populations voudraient aussi voir le fils de Bernard Kolelas, l’un des plus grands opposants que le Congo ait connu depuis 1960.
Okombi Salissa force les barricades
Après avoir soulevé et les foules et réussi son meeting à Talangaï, le traditionnel fief du PCT, André Okombi Salissa a eu du mal à aller vers d’autres villes pour battre sa campagne. A Kinkala et à Impfondo, les préfets ont empêché ses rassemblements, prétextant l’absence d’une autorisation. Mon œil ! Une autorisation pour battre campagne ou bien pour aller au ciel ? A Impfondo, Charles Zacharie Bowao, fils du coin, qui l’embarquait, était obligé de pondre un communiqué, dénonçant l’empêchement dont ils étaient victimes. De 9H à 17H, leur avion était interdit de quitter Brazzaville alors qu’à Impfondo des militants piaffaient d’impatience.
« Tout Bouge » est parfois obligé de battre campagne sans ses hommes de main, les Ngoya Nkessi croupissant en prison, et ne connaissant même pas le jour de son procès. En tout cas pas avant le 20 mars. Lui aussi devrait atterrir à Pointe-Noire pour avoir la bénédiction.
Tsaty Mabiala doit batailler fort
Avec l’une des formations politiques les plus structurées du pays, et un discours conciliateur, Pascal Tsaty Mabiala doit convaincre. Le parti de Pascal Lissouba qu’il conduit ne devrait pas être niché après J4M et Guy Brice Parfait Kolelas. Eux n’ont pas de formations politiques, donc pas de députés ni de sénateurs encore moins de conseillers. Tsaty Mabiala a l’héritage d’un nom très adulé dans les pays du Nirai. Ses sorties dans le Pool et dans la Sangha n’ont pas été spectaculaires. Or c’est là-bas qu’il fallait conquérir. Dans la Bouenza, la Lékoumou et le Niari où les trois palmiers de l’UPADS poussent bien, Tsaty Mabiala a bien mobilisé. Son entrée à Pointe-Noire n’a certes pas été du Mokoko, mais, le gens sont quand même venus l’écouter, une foule importante.
Munari se bat pour se distinguer
Il faut dire que ces 15 jours de campagne ont été un vrai marrathon pour plusieurs candidats. Claudine Munari, obligée d’aller à la rencontre de ses militants, sans cette fois les amis de IDC-FROCAD, a eu bien du mal pour se faire entendre. Heureusement que la campagne se passe en mars, le mois de la femme. Sa grande sortie au PK Mfilou, le 8 mars, a été un succès. Elle a appelé les populations à terrasser l’éléphant et que permettre enfin qu’une femme s’installe au trône. Là, même ses propres partisans ont encore des doutes, quand bien même qu’ils reconnaissent que les femmes ont la douceur de conduire le Congo dans la paix. Apparemment l’heure de la femme n’a pas encore sonné dans le pays. Plusieurs hommes, méchants gars, voient encore les femmes dans les Mouziki et les clubs de Dzango…
Kignoumbi se voit toujours en vice-président
« Joseph opérationnel » est la chanson de sa campagne ! Il a été l’unique candidat à avoir démarré tambours battants sa campagne à Brazzaville. Messe à Saint-François, marche de la place de la République à son siège de campagne de campagne à ex-trésor plateau-ville, concert musical, bruit des jeunes qui réclamaient leurs perdiems de mobilisation, Joseph Kignoumbi Kia Mboungou nous a tout servi ce 4 mars là. Et puis, plus rien.
Des rassemblements modestes à Bouansa, à Yamba, à Sibiti et à Dolisie ne convainquent pas pour finir deuxième comme en 2002 et en 2009 derrière Sassou N’Guesso. Patrick Goma son directeur de campagne devrait bien se relancer en ce dernier virage, car le nord du Congo les attend. Le candidat qui avait fini avec 7% des suffrages des Congolais risque bien de passer inaperçu le 20 mars.
Michel Mboussi Ngouari l’ombre de lui-même
C’est sûr, l’homme de l’alternance n’aura pas à se plaindre au lendemain du 20 mars. Ayant choisi sa ville natale de Mouyondzi pour lancer sa campagne, Michel Mboussi Ngouari, ancien guerrier du MNLC, est rentré à Brazzaville pour ne plus faire du bruit, sinon se plaindre d’une campagne disproportionnée. Sa sortie à Mindouli n’a aussi visiblement rien donné. Difficile en cette phase décisive qu’un autre candidat prête de l’argent à un autre. Mboussi Ngouari qui se targuait être l’homme des mains propre n’aura brillé que comme un éclair pendant cette campagne, et la surprise ne devrait pas être grande le 20 mars.
Anguios Nganguia Engambe, l’homme des jets
A quoi lui sert son jet privé s’il ne peut atterrir à Impfondo pour battre campagne ? Anguios Nganguia Engambe considéré comme Mboussi Ngouari des pions du pouvoir n’a toujours pas battu sa campagne à l’américaine comme il l’avait promis. Jets privés et hélicoptères au cortège. Mais on retiendra de cet inspecteur des impôts qui n’hésite pas de propulse sa « future première dame », l’unique candidat qui a un regard généreux sur les journalistes. En 2009, alors qu’il est candidat malheureux à l’élection présidentielle, Anguios embarque avec lui une dizaine de journalistes pour la France, deux semaines de vacances tous frais payés ! Les gars des médias lorgnent encore de ce côté-là.